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Titre : Avec vue sur l’Arno (vo:A Room with a View)
Auteur : Edward Morgan Forster
Date : 1908
Nombre de pages : 288

  • L’intrigue
Lucy Honeychurch est une jeune fille de bonne famille part avec une cousine Charlotte, une vieille fille en guise de chaperon visiter Florence.
Elle y rencontre George Emerson, un homme assez original qui ne s’occupe pas des convenances.
Une passion débutera entre eux, alors que Charlotte alarmée, essayera de les séparer.

  • Ce que j’en ai pensé

J’ai beaucoup aimé ce livre. Je l’ai lu après avoir vu le film (donc pas beaucoup de surprise), mais c’est un roman que j’ai beaucoup apprécié. Le style est très agréable à lire, on avale les pages sans s’en rendre compte.

Pour moi Forster est un excellent écrivain (une valeur sûre, je sais que ses livres vont me plaire…enfin je l’espère et jusqu’à maintenant, cela a toujours été le cas) et j’économise les livres qu’il me reste à lire de lui.

L’auteur est très virulent dans sa critique de la société. Chose assez rare pour l’époque, il défend la place de la femme, il critique l’Eglise qu’il voit comme lieu de souffrance et il se moque de la société anglaise et de son immobilisme, à travers les personnages secondaires (essentiellement Charlotte et Cecil).

Il critique aussi le fait que la sexualité soit cachée, refoulée. On ne veut pas entendre parler de passion, d’amour fou, tout doit être bien « proper » et rangé et digne.

On attend de Lucy qu’elle soit bien sage, qu’elle continue à être cultivée, qu’elle épouse un gentleman, ait des enfants et qu’elle ait une gentille vie bien rangée. De son avis, de ce qu’elle a envie, la société s’en moque.
Et encore, Lucy a eu de la chance de tomber dans une famille très libre qui lui laissait faire ce qu’elle voulait quand elle le voulait.

Et durant tout le roman, Lucy oscille entre son caractère et son éducation…ce qu’elle veut et ce qu’elle doit faire…elle est tellement programmée par son éducation qu’elle refuse de se rendre compte qu’elle est amoureuse.
Elle essaye toujours de garder un vague contrôle sur quelque chose, alors qu’il est clair dès le début du roman qu’elle ne maîtrise rien du tout.

[Attention, je dévoile la suite]

Il y a énormément de parallèle entre Lucy et Charlotte (même si Lucy refuse catégoriquement de le voir). Elles ont eu exactement la même histoire. Rencontre avec un jeune homme, coup de foudre, passion…
La seule différence entre les deux est le chemin qu’elles ont pris par la suite.

Lucy aurait pu devenir comme Charlotte, une vieille fille seule, malheureuse, à la charge de tous (et pourtant Charlotte qu’on a séparé de l’homme qu’elle aimait jeune, tente au début de faire exactement la même chose à Lucy, avant de se rendre compte de son erreur et de tout faire pour la corriger.)

Si elle ne l’est pas devenue, je pense que c’est uniquement dû à l’époque, qui était moins stricte que celle de la jeunesse de Charlotte. A cette époque là, épouser un homme que la famille n’avait pas choisi devait être impensable.  Pour Lucy, c’était choquant, mais les mœurs étaient entrain de se relâcher un peu.

George, lui, se cherche et veut à tout prix une chose : vivre et ne pas faire les choses à moitié.
Il est passionné, il ressent les choses physiquement et désire un amour aussi physique et  pas juste de l’esprit, comme Cecil (intellectuel qui s’occupait plus de donner des livres à lire à sa fiancée et qui s’est trouvé incapable d’embrasser correctement Lucy la première fois).

George, lui est loin de l’image du parfait gentleman anglais :
Il est décidé à conquérir Lucy quand il la revoit et il va tout tenter, jusqu’à réussir.

C’est ce qui le sauve aux yeux de Lucy : il lui montre réellement son amour, il l’aime pour ce qu’elle est et c’est si tentant de se laisser aller, qu’elle va finir par rompre avec Cecil de manière horriblement froide (après tout il ne lui a jamais réellement montré qu’il l’aimait finalement…il avait tout un petit plan bien net et gentil pour leur mariage et l’éducation des enfants, il voulait changer les manies et manières de sa femme un peu trop lâche à son goût…et pourtant Cecil l’aimait et va être malheureux à l’annonce de cette rupture, malheureux et stupéfait : il est incapable de comprendre ce qui la motive)

C’est un roman qui termine bien (heureusement!) qui fait du bien !

Je conseille aussi vivement le film qui est un petit bijou, aussi bien sur les acteurs  (avec Helena Bonham Carter toute jeune et magnifique, Maggie Smith, Judi Dench, Rupert Graves et Daniel Day-Lewis ) que le scénario et la musique et les décors. A voir et revoir sans modération. (D’ailleurs c’est un des films que je regarde quand je veux me remonter le moral.)

  • Extrait :

Rencontrons nous si souvent le bonheur qu’il faille le faire descendre du siège où il est perché? Être conduits par des amoureux est un sort que les rois nous envieraient. Les séparer? Je ne sais rien, pour moi, qui ressemble plus à un sacrilège.