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Titre : L’Immeuble Yacoubian 
Auteur : Alaa El Aswany
Date : 2002 (2006 en France)
Nombre de pages : 327

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  • L’intrigue

L’immeuble Yacoubian, nommé après son propriétaire a été construit en 1930 en plein cœur du Caire et accueillait au départ des appartements de grand luxe, principalement des riches étrangers.
Quelques décennies plus tard, le bas de l’immeuble a été partagé en tous petits logements, où la population locale cohabite avec les riches égyptiens dans les étages.

  • Ce que j’en ai pensé

Il est difficile de passer après une lecture Coup de cœur, j’ai donc mis un petit moment fin juin à décider du livre suivant. J’en voulais un pas trop gros pour terminer le mois tranquillement et rester dans un esprit d’été.

En fouillant ma liste, je me suis souvenue l’existence de ce roman, un pilon que j’avais récupéré de la bibliothèque où je travaillais. Il avait été mis dans les coups de cœur des bibliothécaires et cela avait suffit pour m’intriguer et me donner envie de l’emmener.

Et je me suis dit que ce roman restait parfait pour l’été ( il fait chaud en Egypte…oui, mon raisonnement n’est pas allé plus loin que ça, je dois l’avouer….). Je ne m’attendais pas à grand chose, même si j’ai tendance à faire confiance aux parutions d’Actes Sud, j’ai été rarement déçue jusqu’à là.

Et j’ai eu raison! J’ai beaucoup aimé ce roman, même si j’ai mis plusieurs jours à le lire, mais c’est plutôt la faute à la fatigue qu’autre chose. A chaque fois que je reprenais ma lecture, je me replongeais ravie de cet univers, la vie de cet immeuble et ses habitants.

Je ne m’attendais pas à passer un aussi bon moment de lecture, je suis donc ravie, surtout qu’il s’agit de mes premiers pas dans la littérature égyptienne ( je crois en tout cas) : J’adore de toute manière les romans où on partage la vie de tout un immeuble, avec des caractères variés et des destins très différents.

On a un peu de tout : le vieux séducteur qui se souvient d’une époque dorée pour la jeunesse noble du pays, la petite étudiante qui rentre de plein fouet dans le monde du travail et l’harcèlement, l’homosexuel, le jeune idéaliste qui croit en les études, le riche politicien…

J’ai beaucoup aimé en apprendre un peu plus sur la société égyptienne (même s’il me manquait clairement des notions historiques et politiques), surtout avec la montée de l’islamisme radical ( les passages dans la mosquée sont…édifiants je dois dire et m’ont marqué) et la corruption, la pauvreté et l’injustice.
Ce roman n’est pas particulièrement joyeux, surtout qu’on s’attache plutôt aux personnages pauvres et qui essayent tant bien que mal de s’en sortir.

C’est donc une vision assez pessimiste, voir désabusée du pays que l’auteur nous présente.

L’immeuble pourrait bien représenter le pays en lui-même : les pauvres et très-pauvres cohabitent et se font écraser par les très riches et ne peuvent rien faire. L’excellent étudiant Taha ne peut pas faire les études qu’il veut parce que son père est concierge et finit par se tourner vers ce qui le rassure : la justice de Dieu. C’est certainement le personnage le plus amer du roman, celui qu’on plaint finalement le plus, qui se fait embrigader alors qu’il aurait pu avoir un beau destin.

Le vieil aristocrate et homme-à-femmes, Zaki est perdu dans ses souvenirs d’âge d’or pour lui et regarde avec regret l’état de son pays. Il n’arrive pas à quitter son pays, mais n’arrive plus à le comprendre.

Boussaïna, quand à elle, victime de son sexe, son âge et sa beauté, découvre avec horreur que travail rime avec harcèlement sexuel et que se « vendre » est finalement ce qui lui rapportera le plus d’argent.

A côté de cela, on voit des personnages comme certains cheikhs ou politiciens qui jouent avec l’argent, la corruption et la vie des gens pour arriver à leurs fins. C’est vraiment terrible, on ressort de cette lecture déboussolé et persuadé que tout est « pourri » et qu’il faudra un long moment avant que les choses ne s’arrangent pour ce pays.

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Une belle lecture donc, une nouvelle vision pour moi de l’Egypte avec de beaux portraits variés d’êtres humains. J’ai passé un très bon moment avec ce roman et je ne peux que  le conseiller!

  • Extrait

Ce pays n’est pas notre pays, Taha, c’est le pays de ceux qui ont de l’argent. Si tu avais eu deux mille livres et que tu les avais données en bakchich, personne ne t’aurait demandé le métier de ton père. Gagne de l’argent, Taha, tu auras tout ce que tu voudras mais si tu restes pauvre on te marchera dessus.